Sri Lanka "L'Ile resplendissante"

Le voyage au Sri Lanka organisé du 9 au 19 mars 2025 par l’AVF et l’agence Gallia, sous la supervision de Jan-Marie Potier fut une passionnante expérience de contrastes. Un habitat souvent inachevé, en parpaings et en tôles, mais de somptueux vestiges médiévaux et classiques. Des villes polluées (Kandy), mais une capitale en plein essor architectural (Colombo). Des villages délabrés, mais une nature tropicale foisonnante et pleine de vigueur. Des routes en piteux état, mais de vastes rizières vert tendre et, dans la montagne le vert sombre des plantations de thé. Expérience des contrastes donc, mais aussi expérience du sacré. L’omniprésence du bouddhisme, religion majoritaire au Sri Lanka, se ressent dans les groupes de fidèles vêtus de blanc, dans les familles chargées de plateaux de fleurs, dans le recueillement silencieux. Le sacré s’expose aussi en pleine lumière : majestueux Bouddhas sculptés, au visage lisse et pacifié, temples et stupas de toutes dimensions, grottes ornées de fresques, pierres de lune au seuil des temples, ces bas-reliefs semi-circulaires posés à terre exposant dans leurs arcs de pierre les étapes initiatiques du parcours terrestre.

Pour nous touristes, ces découvertes exigent une organisation bien réglée et l’investissement d’un guide compétent. Nous avons eu cette chance. Notre guide francophone, Lalith, a montré de réelles qualités d’organisation et un sens de la convivialité dont nous n’avons eu qu’à nous féliciter. Plus tourné, il est vrai, vers les réalités sociales et vers les richesses botaniques que vers les méandres de l’histoire ou les arcanes du bouddhisme, il a fort bien joué son rôle, disponible à chacun et à tous moments. De surcroît, il en a étonné plus d’un par son humour fin et même un esprit d’auto-dérision plutôt rare dans la profession. Il nous a par exemple ironiquement expliqué que les Srilankais les plus assurés de gagner le paradis étaient les chauffeurs de transports en commun, tant les prières s’élevaient nombreuses derrière eux. De fait, il n’est pas rare qu’un bus rouge municipal lancé à pleine vitesse effectue un dépassement dans un virage à quelques centimètres du véhicule doublé. Plus profondément, notre guide nous est apparu au fil des jours représentatif de cette population srilankaise souriante, affable, respectueuse et mesurée.

Le voyage est également affaire de sensation, d’émotion. Parfois même surgit l’écho d’une profondeur oubliée : volupté des éléphants se roulant dans la rivière, tendre éveil au monde des tortues de mer venant de naître (Kosgoda), éclair d’un regard échangé avec un singe chapardeur, étrangeté du cri des paons, au petit matin, dans le jardin perlé de pluie de l’hôtel Aliya (Sigiriya). Ajoutons le plaisir des senteurs épicées, le saisissement devant les extraordinaires banyans pris dans la forêt de leurs racines aériennes ou encore la touffeur brûlante d’une fabrique de thé. Le voyage, c’est enfin (et peut-être surtout) la rencontre. Rencontre avec des familles, partage de repas, courts échanges avec des pêcheurs, palabres plus durables avec les commerçants. S’il faut piocher dans le riche lot des rencontres, beaucoup se souviendront de ces enfants d’une modeste école primaire de campagne, qui nous ont fait fête par leurs chants, encadrés par leurs adorables maîtresses en saris, impeccablement vêtus, souriants, heureux. Nulle trace en eux de contrariété ou d’ennui, des regards intelligents et confiants : une vraie rencontre.

Pour finir, ces lignes de Claude Lévi-Strauss (encore lui !), tant elles paraissent pouvoir résonner avec notre voyage. Il y est question du dépaysement lointain, de l’échappée vers l’Autre : «Cette arche ténue qui nous relie à l’inaccessible (…) [nous invite], pendant les brefs intervalles où notre espèce supporte d’interrompre son labeur de ruche, à saisir l’essence de ce qu’elle fut et continue d’être, en-deçà de la pensée et au-delà de la société : dans la contemplation d’un minéral plus beau que toutes nos œuvres, dans le parfum plus beau que nos livres respiré au creux d’un lis ; ou dans le clin d’œil alourdi de patience, de sérénité et de pudeur réciproque qu’une entente involontaire permet parfois d’échanger avec un chat ».

Merci à Jan-Marie Potier, initiateur et organisateur de ce beau voyage.

Et merci aux vingt-six compagnons de voyage, de joyeuse humeur et d’agréable compagnie.

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